Thread : pourquoi les restaurateurs ont du mal à recruter
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Après plusieurs mois compliqués dus à la pandémie, les restaurants ont pu rouvrir. Mais ils font face à une nouvelle difficulté, celle de trouver de nouveaux employé(e)s. Bas salaire, horaires interminables, pression constante, le secteur est de moins en moins attractif comme le montre ce témoignage d’un ancien salarié.
Un thread de @fernando_bpa
Petit thread sur mon ancien emploi en restauration dans un restaurant étoilé de Paris, dans le très chic 16ème arrondissement. Pour mesurer un peu l'ampleur de la précarité du milieu de la restauration. On penserit que les grandes maisons sont épargnées. Loin s'en faut. [1/n]
— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
Je signe un contrat début juillet. En salle, pour servir des clients qui viennent déguster des produits travaillés, voire d'exception, sur ce point là je n'ai pas à en juger mais c'est très bon et très bien fait. Autre débat.
Je commence en CDI directement. 1500e nets par moi— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
39h/semaine plafonnées en heure supplémentaire à 48h (légales). J'en ferais 70h parfois. 65 en moyenne. Payées 39h. Je rentre chez-moi à 2h du matin, je dois être au boulot à 10h. 5 jours sur 7, en devant fournir un service impeccable pour les clients. Logique c'est un étoilé.
— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
Vint une semaine où je suis malade durant 3-4 jours (fièvre, toux, courbature etc.). Je viens quand même au taf. Je me prends des cartouches parce que je "ne suis pas assez efficace, trop mou et trop lent".
"Prends dix cafés, une tisane, du Redbull ou de la cocaïne je m'en fous— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
mais ressaisis toi sinon ça va pas le faire" (en gros t'es viré).
Des humiliations parfois devant toute l'équipe parce que j'ai raté un service parce que je n'avais pas d'appartements sur Paris durant cette période, que c'était compliqué. J'avais déjà envie de démissionner parce— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
que la pression était trop forte. On m'avait sous-entendu que si on avait pas la deuxième étoile au Guide Michelin ce serait de ma faute, à cause de mon manque d'implication. On me reprochait ma coupe de cheveux (trop longue), le fait que je n'étais pas rasé de près
— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
(depuis 24h hein), de ne pas me tenir assez droit, de ne pas assez sourire. Parfois je faisais des journées de 10h du matin à 1h avec 1h30 de pause dans la journée. Pour 1500€ par mois, tout en étant méprisé par mes supérieurs hiérarchiques. Tu te retrouves dans un boucle
— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
de culpabilisation où t'as l'impression que tu donnes pas assez de toi-même, du coup tu te crèves au boulot. Littéralement. Jusqu'au jour où le corps dit stop. Du coup j'ai fait une crise d'épilepsie un soir. Un vendredi durant mon sommeil. Je rates donc logiquement une journée
— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
de travail. La réponse du Chef? "J'ai du aller travailler à ta place".
À l'hôpital on m'a signifié que j'étais en début de burn-out. Que j'étais stressé plus que d'ordinaire. J'ai eu une semaine d'arrêt suite à ça. J'ai fini mon mois et j'ai démissionné.— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
Concernant les irrégularités de contrat, il y en a plein. Je suis considéré comme "commis de cuisine" sur le contrat. Alors que je bosse jamais en cuisine, que je suis à la limite commis de salle, apprenti chef de rang.
Et concernant les heures payées par semaine je n'en parle— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
même pas. Bref. Pensez-y la prochaine fois que vous allez manger dans un grand restaurant. Les petites mains qui sont derrière les grands chefs sont souvent précaires, et dans la grande majorité des cas méprisés et souvent humiliés pour des petits choses qui vous semblent
— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021
absurdes ou que l'on ne voit même pas.
Et après les patrons dans la restauration se plaignent de ne trouver personne en salle… [12/12]— Fernando (@fernando_bpa) November 14, 2021