Thread : comment débusquer un Nazi ?
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En février 1943, alors que la France est encore sous la domination du IIIème reich , Klaus Barbie, un officier allemand connu pour sa cruauté, devient le chef de la Gestapo de la région lyonnaise. Sous ses ordres sont torturés et exécutés de nombreux résistants dont le plus connu était Jean Moulin. Il fait tellement bien son « travail » qu’il est surnommé « le bourreau de Lyon ». La guerre perdue, il se cache quelques temps dans son pays natal avant d’être recruté par la CIA. L’agence américaine recrute en effet d’anciens nazis pendant la guerre froide car ils cumulent une solide expérience professionnelle du renseignement et un anticommunisme farouche. Mais en France, la traque de Klaus Barbie vient de commencer…
Un thread signé @Benazdia
Voici comment un journaliste a piégé de manière magistrale un ancien Nazi pendant une interview pour la télévision française.
Vous allez voir que cette histoire est digne d'un roman d'espionnage et que le piège aurait pu être déjoué à plusieurs reprises.
Un #thread à dérouler pic.twitter.com/PttkUGE2yh
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Cet ancien nazi, vous en avez certainement entendu parler. Il s'agit du "Boucher de Lyon", ou Klaus Barbie. Il était chef de la Gestapo de Lyon entre 1942 et 1944. Il est à l'origine de la déportation de milliers de juifs, gays, gitans et de l'arrestation et torture de résistants pic.twitter.com/3zlLt1bGAY
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
A la fin du conflit, il va collaborer avec les américains qui utilisent ses connaissances des milieux communistes. Mais sous la pression de la France qui veut le juger, les américains vont exfiltrer leur protégé en Amérique du sud et diront qu'ils ont perdu sa trace pic.twitter.com/8wz3EExSeH
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Pendant plus de 20 ans, Barbie va vivre une vie normale sous l'identité de Klaus Altmann au Pérou et en Bolivie. pic.twitter.com/QmSfnvp79e
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Seulement, Serge et Beate Klarsfled (photo), des chasseurs de nazis identifient Altmann comme Klaus Barbie. Afin de faire taire ces rumeurs et protéger l'identité du criminel de guerre, le ministère de l'intérieur Bolivien accepte d'accorder un entretien à la télé française. pic.twitter.com/KuBcaIpjDR
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Les règles de l'entretien sont strictes :
– Quelques minutes de discussion
– Les questions doivent être en espagnol et validées à l'avanceLe journaliste choisi s'appelle Ladislas de Hoyos. Il est avec son cameraman seulement dans un petit bureau. pic.twitter.com/iUDDBAerRl
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Klaus Altmann, homme grisonnant, un peu voûté, crâne légèrement dégarni entre. Il est serein.
Ladislas de Hoyos par contre est nerveux et commence l'entretien en posant les questions prévues par les autorités. pic.twitter.com/OkBefCfvII— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Evidemment, Klaus Altmann nie être Klaus Barbie et précise que les autorités boliviennes pourront fournir les documents qui l'attestent. Il s'agit d'un simple ressortissant allemand qui a reçu la nationalité bolivienne et qui a une vie tout à fait banal. pic.twitter.com/Ae4RMGjbK8
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
C'est alors que Ladislas de Hoyos, sans prévenir et contre les règles imposées par le ministère, pose alors cette question en français : "N'êtes vous jamais allé à Lyon ?"
Surprise ! Altmann répond alors en allemand et sans hésiter : "Je ne suis jamais à Lyon" pic.twitter.com/prDB8A7tpP— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Sauf qu'Altmann n'est pas censé connaître le français. La tension monte dans la pièce. C'est alors que Ldislas de Hoyos tend des photos à Klaus Altmann. Il s'agit de la photo de Jean Moulin, célèbre résistant français, arrêté et torturé à mort par Klaus Barbie, 29 ans plus tôt. pic.twitter.com/mn78qTVISJ
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Klaus Altmann les prend, les regarde, et affirme ne pas connaître cette personne. Il rend alors les clichés à Ladislas qui le rangent dans sa veste. Et sans s'en rendre compte Altmann est tombé dans le piège tendu par le journaliste. Comment ? pic.twitter.com/L3rMm7bORR
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
En prenant les photos, Klaus Altmann a déposé son empreinte digitale sur le papier. S'il s'agit de Klaus Barbie, Ladislas de Hoyos en a maintenant la preuve mais il faut encore l'analyser. pic.twitter.com/jcSL5841qY
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
L'interview se poursuit. Ladislas lui demande de répéter des phrases en français comme "je ne suis pas un assassin". "Je n'ai jamais torturé". Altmann fait semblant d'hésiter et ça s'entend. L'entretien se termine et les hommes du Ministère comprennent qu'ils se sont faits rouler pic.twitter.com/5EIovjV0g5
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Le cameraman Christian Van Ryswick en profite pour cacher les bobines de film dans un petit sac qu'il remet au Consul de France présent dans la pièce. Il ui dit : "tirez-vous d'ici, Allez à l'ambassade". pic.twitter.com/W1n1IDpm8j
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Bon réflexe car les officiers du Ministères exigent du caméraman qu'il leur remettent le film, il leur tend alors deux bobines vierges. Ladislas de Hoyos sert la main de Klaus Altmann. Les deux hommes se regardent dans les yeux. pic.twitter.com/2Fzp2GcrIF
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Les deux journalistes se précipitent alors à l'ambassade de France à quelques centaines de mètres de là. Sur place, de Hoyos se met à pleurer. Les empreintes sont analysées en France, les preuves sont formelles : Altmann et Barbie ne font qu'un. pic.twitter.com/RAViKjHINe
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Les bobines de film traversent l'Atlantique en valise diplomatique et sont diffusées sur Antenne 2 quelques jours plus tard. https://t.co/vxXPNpXJ9M
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Mais il faudra attendre 1983 pour que la dictature Bolivienne accepte de se séparer de son protégé aux compétences utiles pour ce genre de régime. Après des négociation et en échange d'armes, la Bolivie accepte de le livrer à la France.
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Il sera emprisonné à Lyon dans le lieu même où il torturait ses victimes. En 1987, le procès Barbie s'ouvre enfin. Il est reconnu coupable de 17 crimes contre l'humanité, sans circonstances atténuantes. Il est condamné à la prison à perpétuité et n'exprimera aucun regret. pic.twitter.com/rg4bFSwob7
— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Voilà, ce #thread est terminé. Si vous ne connaissiez pas cette histoire (ou ses détails), j'espère que ça vous aura intéressé.
à bientôt pour un nouveau #thread pic.twitter.com/ccug5cpUQD— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Comme toujours, voici les sources utilisées :
ce reportage : https://t.co/FIdz6lSdRT
cette émission : https://t.co/8XCrSmlpUb
cette interview : https://t.co/jbJlzlSqg5
ce grand dossier : https://t.co/Eu9u2HTbEp— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021
Et aussi
Cette excellente vidéo https://t.co/DSqLZq2sp0 et celle ci aussi : https://t.co/eSPq2WVFgv
L’indispensable archive : https://t.co/JKh9X5zyOa
Pour aller plus loin sur Jean Moulin : https://t.co/qsAT37qxHP
Et sur le procès Barbie : https://t.co/k2zeFiNGCc— Norédine Benazdia (@Benazdia) June 2, 2021