Tweetstory : l’élection des délégués
0
Après la rentrée vient le temps des élections de délégués de classe. Nicolas Delesalle raconte celle de sa fille. Et ce n’est pas triste ! (quoique si un peu…)
Parfois, 140 caractères c’est insuffisant. Alors il y a les tweetstories : ces histoires racontées en plusieurs tweets qui sont devenues un style à part entière.
Hier, c'était l'élection des délégués dans la classe de ma fille cadette. L'occasion de se frotter à l'exercice de la démocratie. Oh yeah.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) October 11, 2016
Ma fille s'est donc mise en tête de sauver le monde en commençant par son école et sa classe. Elle m'a recruté comme directeur de campagne.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
C'était mal payé, alors j'ai dit oui.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
28 élèves. 8 candidates. Les garçons, en minorité, ont décidé de ne pas se présenter et de voter blanc. « Les filles, c'est nul. »
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Les huit candidates ont chacune présenté un slogan et un programme. Elles se sont donné du mal. Photo, écriture appliquée. CM1.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Nous, on a bossé sur l'idée d'une école plus généreuse, sur la bienveillance entre les élèves, l'entraide. Les valeurs, l'humanité. Bien vu.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Gros gros succès. Elle a recueilli une voix. La sienne.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Hier soir, elle essayait de masquer sa déception. J'ai senti qu'elle n'était pas loin de vouloir virer son directeur de campagne.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
C'est compliqué l'apprentissage de la démocratie. Elle m'a dit que six autres candidates avaient des programmes un peu similaires.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Elles n'ont pas fait beaucoup mieux. L'une d'entre elles n'a recueilli aucune voix ; cette grande âme n'a pas voté pour elle-même.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Vu le nombre de candidatures, fallait s'attendre à une large répartition des voix. La gagnante l'a emporté en convainquant sept électeurs.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Ce qui est intéressant, c'est qu'elle a gagné grâce aux voix d'une minorité : les garçons. Ils ont changé d'avis. Ils ont voté.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Pourquoi ? Comment ? Simple. Le programme vainqueur reposait sur une idée forte : l'agrandissement du terrain de foot dans la cours de récré
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Je n'ai pas pu m'empêcher de siffler d'admiration.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
« Si j'avais su, j'aurais proposé des burgers frites tous les jours et la fin des devoirs » a dit ma fille.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Moi j'ai pensé à l'achat de plantes carnivores, la chasse au Pokémon chaque matin, l'installation d'une grande roue dans la cours.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Ou même la réduction de la fracture sociale, la lutte contre la finance internationale, la fermeture de Guantanamo.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
« En plus, c'est im-pos-si-ble d'agrandir le terrain de foot, il occupe déjà toute la place, la cour est trop petite ! », a rugi ma fille.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Promettre un truc impossible à des électeurs qui sont au courant mais trouvent ça cool. Respect.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
« Les garçons sont vraiment débiles ! Et « M », comment elle peut promettre ça ?»
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Ma fille m'a dit ça avec le regard de De Niro qui parle de Donald Trump.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
J'étais partagé entre le cynisme admiratif et désabusé de l'adulte et le volontarisme enthousiaste et choqué du père.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
J'ai voulu lui dire que les garçons n'étaient pas forcément débiles. Qu'ils font simplement comme les adultes.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Ils votent pour les promesses irréalistes les plus proches de leurs centres d'intérêt.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Quant à « M », elle a peut-être des parents un peu moins niais que moi. Ou alors, elle est née rouée.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Finalement, je me suis tu. Elle découvrira tout ça bien assez vite.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
En s'endormant, elle m'a dit que ça ne servait à rien d'être honnête pour être élu. Ça m'a un peu brisé le coeur.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Encore une fois, j'allais lui répondre « Mais non, mais tu vois », et tout ce qui s'ensuit.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Les victoires laides ne sont pas de vraies victoires. La grandeur. La noblesse. L'élégance. Ne jamais s'abaisser.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Et puis j'ai pensé à Trump, Clinton, Sarkozy, Hollande, Chirac, et les promesses des tenants du Brexit, et tous les autres.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Et puis j'ai pensé à la petite fille déléguée qui s'endormait au même instant en sachant comment on gagne.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Alors j'ai juste dit « Bonne nuit ». Ce soir, je relis Le Prince de Machiavel. On va mieux se préparer pour les élections de CM2.
— Nicolas Delesalle (@KoliaDelesalle) 11 octobre 2016
Commentaires 0
comments for this post are closed