Thread : l’homosexualité en Mésopotamie
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On évoque souvent l’homosexualité en Grèce antique, notamment pour souligner qu’il s’agit d’une pratique ancienne et que ce n’est pas un « phénomène de mode » comme certain·es voudraient le faire croire. Ce thread nous montre qu’on a des traces encore bien plus anciennes de l’existence de l’homosexualité, il y a plus de 5000 ans.
Un thread de @Thoukudids1
Bonjour à tous, nouveau thread !
Comment l'homosexualité est-elle vécue et perçue en Mésopotamie? pic.twitter.com/CMgNYQ6Uyf
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Comme toujours le propos n’est pas entièrement exhaustif et les sources rendent très difficile d’émettre ne serait-ce que des hypothèses sur l’homosexualité féminine.
Le présent thread est un condensé de cet ouvrage (seulement les parties mésopotamiennes). pic.twitter.com/gUiAYBdjpw— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Tout d’abord il convient de rappeler que l’homosexualité en Mésopotamie n’est pas taboue, et encore moins un péché. Dans une certaine mesure la sexualité est même plutôt valorisée dans la pensée mésopotamienne (en général). pic.twitter.com/YcdSZRIbLO
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
L’inéluctabilité de la mort a plutôt conduit les Mésopotamiens à jouir des plaisirs terrestres de leur vivant ce qui ne leur seraient plus possible une fois dans le monde des morts. Pour rappel voici un petit thread sur les enfers en Mésopotamie. https://t.co/pWCdvZPJlE
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Des lieux importants de l’homosexualité sont les temples d’Ištar. Ishtar est une déesse ambivalente. Elle est la déesse du sexe et de la guerre. De ce fait elle possède des attributs à la fois féminin et masculin (ce n’est pas la seule divinité dans ce cas). pic.twitter.com/1p1ZYPO29H
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Ainsi dans divers textes, elle est décrite comme « viril » (zikrutû), et même possédant de la barbe. Ses attributions guerrières la rapprochent de la masculinité et les rois se revendiquent de cette déesse pour légitimer leur pouvoir militaire et royal. pic.twitter.com/5LH366BUR6
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Important de noter qu’elle est la déesse du sexe et pas du mariage ni de la reproduction. Dans cette attribution il est donc essentiellement fait allusion au sexe comme plaisir. Cette attribution peut avoir induit (ou inversement) des représentations + ou – dénudées de la déesse. pic.twitter.com/oZ1IdxJXKD
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Ainsi dans de nombreux textes Ištar se voit attribuer des amants différents et nombreux. C’est notamment ce que lui reproche Gilgameš quand ce dernier est courtisé par la déesse. Il craint de faire partie de la longue liste de ses amants qui ont mal fini. pic.twitter.com/nkKtYUnRBJ
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Dans ses temples se seraient trouvés un personnel dédié à des activités de prostitution féminine et masculine. Kurganû (sumérien) ou assinnu (en akkadien) désigne un homme prostitué dans les temples d’Ištar.
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Voici un thread sur la prostitution dans les temples d'Ištar :https://t.co/bc5Wdii9P5
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Donc dans le cadre de ces temples, des hommes pouvaient avoir des relations sexuelles avec des prostitués homme ou femme, mais dans le cas de l'homme le kurganû/assinnu est toujours en position de "dominé".
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Le bénéfice pour un homme d'avoir un rapport sexuel avec un kurganû/assinnu est également visible dans un texte divinatoire, cela octroierait à l'homme une forme de purification. Ce texte nous montre aussi l'importance du statut social dans un rapport homosexuel. pic.twitter.com/NOybdViosf
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Ainsi un homme ne peut avoir un rapport avec un esclave né dans sa maison (risque qu'il en soit le père donc inceste?). Ni avec un gerseqqû, terme désignant un prêtre d'un temple ou un homme travaillant pour le palais, donc des hommes aux statuts socialement élevés. pic.twitter.com/mXyzMMmb25
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Parle-t-on de l’homosexualité dans les lois ? L’homosexualité n’est pas présente dans le code de Hammurabi qui portant sanctionne des comportements sexuels comme l’adultère des femmes. L’homosexualité ne semble pas pénalement répréhensible à Babylone. pic.twitter.com/C3mpjWY6dj
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Idem pour un recueil de lois Hittite, qui n’évoque des sentences contre des actes homosexuels que s’ils ont lieu dans un contexte incestueux. pic.twitter.com/n5Lk8ObiuB
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Un point + délicat sont des lois assyriennes, qui lues rapidement semble induire une pénalisation de l’homosexualité. Néanmoins les auteurs de l’ouvrage mentionné au début, juge que la pénalisation serait seulement celle d’un acte sexuel non consenti par la sanction d’un seul. pic.twitter.com/ewbtwQqWpS
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Nous pouvons également ajouter que des textes astrologiques néo-babylonien (Ier millénaire) présentent des incantations/prières dont l'objectif est de favoriser l'amour d'une personne d'un certain sexe envers une personne d'un certain sexe également. (Absence femme/femme). pic.twitter.com/t7sMY1a64c
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Bien que cela n’ait pas été dit explicitement par les auteurs de l’ouvrage, j’ai trouvé qu’il y avait des similitudes entre l’homosexualité, vécue et perçue, en Grèce et en Mésopotamie.
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Bien que cela soit variable d’une cité grecque à l’autre, en général l’homosexualité était tolérée quand on restait dans le cycle de l’éromène. Un homme mûr pouvait s’éprendre d’un homme jeune et avoir des relations sexuelles avec lui, mais seulement s’il était le « dominant ». pic.twitter.com/9vhcEa9vUq
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Un homme mûr ne devait pas « recevoir » et il n’était pas bien vu pour lui d’avoir des relations sexuelles avec un homme de son âge et de son niveau social.
(extrait de l'introduction du Banquet de Platon par Luc Brisson) pic.twitter.com/SH5DisvkGV— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Cette notion de l’importance du statut social et du rôle actif dans le rapport sexuel n’est donc pas sans rappeler l’homosexualité mésopotamienne, sauf que dans le cas mésopotamien cela semble plus libre ne serait-ce qu’au niveau de l’âge.
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Il semble que l’on puisse en conclure une certaine généralité qui voudrait que l’homosexualité soit tolérée et socialement acceptable quand il s’agit d’une relation secondaire, et davantage quand on est celui « qui donne ».
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Néanmoins comme le souligne les auteurs de l'ouvrage, malgré cette relative liberté sexuelle, il est fort probable qu'il serait reproché à un homme non marié et sans enfants son homosexualité. Cela du fait de l'importance sociale et éco° du mariage et d'avoir une descendance.
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Bonus :
Gilgameš et Enkidu sont-ils homosexuels?
Selon les auteurs de l'ouvrage, on ne peut réellement les qualifier "d'homosexuel" bien que leur forte proximité puisse l'induire. Les auteurs antiques ont produit des jeux de mots laissant planer une "tension homo-érotique". pic.twitter.com/ylrCmITAis— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Pour reprendre les mots des auteurs Gilgameš et Enkidu partagent un "amour extraordinaire, exclusif et complexe". On est au-delà du concept, d'amitié et d'homosexualité. pic.twitter.com/bczvngJYbr
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022
Voilà c'est tout pour cette fois, et merci de m'avoir lu 😌👌
À la prochaine sur les rives de l'Euphrate 👋
— Thoukudidès 𒈗𒃲 (@Thoukudids1) December 11, 2022