Thread : ce jour où j’ai réalisé
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S’il est si difficile de sortir de l’emprise d’un conjoint violent, c’est qu’on ne comprend pas justement que l’on est sous emprise.
Un thread de @Jura6Ka
Il y a bientôt 15 ans, j'ai fait une énorme connerie, mais je ne le savais pas encore.
A 20 ans et fraîchement remise d'un chagrin d'amour, j'avais revu un ami de collège, dont je m'étais éloignée parce qu'il était devenu un peu trop collant au lycée.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Le 9 septembre 2006, nous sommes sortis ensemble.
Pour moi, c'était un flirt comme ça.
Au bout de 3 semaines, j'ai eu envie d'arrêter, mais sans me laisser le temps de m'exprimer entièrement, il m'a fait savoir à quel point une rupture lui ferait du mal.
J'ai culpabilisé,…— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Puis notre relation a continué, sans rien de particulier.
Il s'est présenté de lui-même à mes parents, contre mon avis.
Il me rappelait souvent à quel point je comptais pour lui. Et que je ne comptais pas pour beaucoup d'autres personnes.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Chaque compliment ou mot gentil était accompagné d'un mot rabaissant. Quand j'ai eu mon permis, il m'a dit qu'il s'inquiétait de me savoir au volant, parce qu'il sentait que je n'étais pas "faite pour ça". Mon BTS, il ne voulait pas en entendre parler.
— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Quand j'ai voulu partir faire une licence pro sur Nice, il m'a trouvé un travail à Besançon…
Il devait soi-disant être muté, il fallait donc que je reste pour le suivre le moment venu.
Il n'a jamais été muté, mais viré.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Et la vie a continué.
En 2009, toutes les merdes possibles sont tombées sur ma famille.
Décès, chômage, un cancer pour ma mère et une grossesse extra-utérine pour moi.
Et là, il a pu me rabaisser à souhait.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Il me rappelait à quel point j'avais de la chance de l'avoir et qu'il était bien sympa de m'accepter avec une trompe en moins, "plus vraiment une femme", "n'aura jamais d'enfant".
Remettait en cause la potentielle survie de ma mère (spoiler : elle va bien).— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Parallèlement, il avait des embrouilles de tous les côtés.
Je passais mon temps à lui chercher du travail, rédiger des courriers, rechercher des textes de loi.
Il avait tort, mais il attendait de moi que je règle tout. Je lui devais bien ça.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Il me trouvait toujours un reproche, ne supportait plus de me voir sourire.
J'adorais mon travail, mais m'efforcais d'avoir l'air triste en rentrant.
Les chaises ont commencé à voler sur moi.
Les chutes sont devenues fréquentes.
Je suis allée 10 fois aux urgences en 2009.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Mais aucun coup direct. Toujours la faute à pas de chance.
Puis les meubles cassés "t'as de la chance que je me sois retenu, sinon c'était pour ta gueule".
Et d'autres remarques que je n'ai pas encore l'envie d'écrire.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Puis, j'ai vécu l'enfer pendant quelques mois, au point d'être totalement isolée.
De + en + de blessures "accidentelles".
Un après-midi où je pleurais sur un banc, j'ai fait la connaissance d'Allan. Militaire totalement déjanté, absolument pas apte à agir dans cette situation.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Mais il a voulu m'aider, lui péter la gueule,… Bref, il ne comprenait ni ma peur, ni mon besoin de pouvoir me projeter dans une situation viable à long terme.
Mais il ne m'a jamais laissée tomber.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Le 22 septembre 2009, il était à plus de 400 km quand j'ai dû partir dans l'urgence.
C'est donc seule que j'ai quitté cette vie de merde.
J'ai réussi à attraper mon sac à main en sortant.
Sans ça, j'aurais fait demi tour.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Je me suis cachée sous une camionnette, avant qu'une femme ne m'accueille chez elle pour me cacher en attendant de l'aide.
Elle n'a pas allumé la lumière de la cage d'escaliers, pour ne pas qu'il me voit.
Elle avait vraiment de la suite dans les idées…— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Je suis retournée vivre chez mes parents. On m'a prêté des vêtements,… Parce que j'ai tout laissé derrière moi (sauf mon sac 😊).
Mais il continuait à roder vers chez moi, me suivre, m'appeler, m'envoyer des courriers, me menacer, me promettre de se faire soigner,…— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
Le lendemain de mon départ, j'ai tout raconté à mon frère.
Mais je lui trouvais des excuses et me trouvais des reproches.
Mon frère (ancien policier) m'a dit "tu as exactement le discours de toutes les femmes battues".
Le terme m'a fait sursauter.— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021
C'est donc le lendemain de mon départ que j'ai réalisé que j'avais été une femme battue.
— La Folle du Jura (@Jura6Ka) September 7, 2021