A la barre, Bernard se tient bien droit, le regard fier. Il porte un très joli costume, avec un petit foulard de soie qui dépasse de la poche devant. La soixantaine bien conservée, il s'efforce à peine de ne pas montrer qu'il est au mieux abasourdi, au pire scandalisé d'être là.

— Juge Dread (@juge_dread) March 12, 2022

Ancien cadre, à la retraite depuis peu, il vit très confortablement avec son épouse et avait notamment décidé il y a quelques années d'acheter une belle maison à la campagne, pour profiter de l'espace et s'échapper des contraintes parisiennes le temps d'un week-end.

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3 hectares de terrain, c'était bcp de travail, Bernard avait donc demandé à un ami de lui trouver qqun pour entretenir tout ça, tondre la pelouse, réparer les clôtures, tailler les haies etc..
C'est comme cela qu'il avait rencontré Yvan.

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Yvan avait la cinquantaine mais une situation bien moins enviable que celle de Bernard. Des problèmes psychologiques liés à un accident plus jeune, un choc à la tête. Tout à fait apte physiquement mais vulnérable psychologiquement : un peu limité intellectuellement.

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Il arrivait cependant à se débrouiller avec sa pension d'invalidité et n'aurait jamais fait de mal à une mouche.
Il avait donc commencé à travailler pour Bernard, en étant logé sur place dans une petite dépendance.
Au début, tout se passait très bien.

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Mais au fil des semaines, Bernard avait commencé à lui parler mal, bcp d'insultes.
De plus en plus de travaux à faire sur la propriété.
Et il lui avait aussi pris sa carte bancaire et son code.
"Pour l'aider dans ses comptes", Bernard avait dit.
Il lui donnait un peu d'argent

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en liquide chaque semaine pour acheter courses et cigarettes.
Sauf qu'avec 50€ par semaine, Yvan n'arrivait plus à se nourrir comme avant et avait de plus en plus faim. Il allait quémander des repas chez une voisine, en échange de petit bricolage.

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Au bout de plus d'un an, excédé par les insultes de trop, Yvan était parti de chez Bernard et s'était réfugié chez la voisine. Cette dernière l'avait mis en contact avec une assistante sociale. Laquelle avait remis tous les comptes d'Yvan à plat et examiné les relevés bancaires.

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Elle avait ainsi constaté de très nombreux retraits aux DAB, vidant la totalité des 700€ de pension perçue par Yvan. Ce dernier avait nié en être l'auteur, il faut dire que ce n'est pas en mobylette qu'il allait pouvoir se rendre à Courchevel ou à Dinard..

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L'enquête avait ainsi commencé et révélé que Bernard avait siphonné les comptes d'Yvan depuis de nombreux mois.
Interrogé sur cela, Bernard avait vite reconnu les faits. Oui il gérait les comptes d'Yvan à sa place mais dans l'intérêt de ce dernier évidemment.

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Oui il utilisait sa CB pour ses propres dépenses mais ce n'était qu'en compensation par rapport à tout ce qu'il faisait pour Yvan.
"Rendez-vous compte Mme le juge, je le loge gracieusement sur ma propriété ! Oui il me rend quelques petits services en échange mais ce n'est pas

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mon employé, d'ailleurs nous n'avons signé aucun contrat de travail voyez-vous ! "

Bernard ne comprenait pas les nombreux témoignages des voisins et des proches d'Yvan qui tous attestaient des journées entières que ce dernier passait à entretenir sa belle et grande propriété.

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Même son ancienne femme de ménage confirmait les grosses journées de travail que faisait Yvan, et ce 6 jours sur 7.
Tout cela n'était que "billevesées et jalousies" selon Bernard.
Lequel était resté médusé en entendant le Procureur requérir de l'emprisonnement ferme contre lui.

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Quant aux constitutions de partie civile, elles étaient "fantaisistes" selon lui : passe encore que la tutrice d'Yvan (nouvellement nommée) lui réclame le remboursement des sommes retirées aux DAB.
Mais l'URSSAF qui lui réclamait des dizaines de milliers d'euros, là c'était trop.

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A l'énoncé de sa condamnation à une peine mixte, mêlant prison ferme et mise à l'épreuve avec obligation d'indemniser les victimes, Bernard a poussé un long soupir et indiqué immédiatement qu'il allait faire appel.

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Quelques mois plus tard, la cour d'appel confirmait la totalité du jugement, et y ajoutait une peine d'amende de 15.000€.
Il paraît qu'on l'avait entendu crier au scandale dans la salle des pas perdus.

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