Il y a quelques jours, alors que je subissais une grosse crise d'endométriose en visitant un monument, j'ai voulu utiliser ma carte de priorité pour éviter la queue aux toilettes.

Toutes celles et ceux concernés par un handicap invisible peuvent déjà prédire la scène 🙃

— Hélèna 🧭 (@Helena_Schfs) September 13, 2024

Pour la première fois, on m'a refusé la priorité. En bloc. Par bloc, je veux parler d'une dizaine de femmes qui se sont serré les coudes pour me refuser ce droit.

J'imagine que le plus surprenant, c'est d'avoir eu la chance d'échapper à ce genre de réactions jusqu'ici.

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Ma carte, je l'utilise vraiment rarement, sûrement moins que je devrais, d'ailleurs. En partie parce que j'ai toujours très peur de la réaction des valides.

Je ne la sors donc que si je ne peux vraiment pas faire autrement…

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… donc à des moments ou je suis aussi plus vulnérable, moins capable de batailler si on m'oppose un refus.

Et jusqu'ici, ça s'était globalement tjrs plutôt "bien" passé. J'ai conscience d'être très chanceuse de ça. Des gens agacés, ou froids, c'est arrivé. Pas un refus formel.

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Là, en l'occurrence, quand la crise a commencé, la douleur est montée très vite et très fort. Comme d'habitude.

Et comme je sais aussi qu'avoir la vessie pleine amplifie les douleurs, je me suis dirigée vers les WC, où patientaient un peu moins de 10 femmes.

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Pour le contexte, j'étais pas en France, mais tout le monde dans la file parlait très bien anglais.

Je remonte donc la queue pour demander à la première femme s'il y a bien des WC handicapés ici, comme indiqué sur le panneau. Elle me répond que non (malgré le logo à l'entrée).

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Je lui demande donc si elle voudrait bien me laisser passer, en lui expliquant la situation, carte à l'appui.

À ma surprise, elle s'indigne directement.

Selon elle, j'ai l'air en pleine forme, j'ai pas l'air handicapée.

Elle martèle ça plusieurs fois.

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Je me dis "Tiens, il fallait bien que ça arrive un jour".

Je tombe quand même un peu des nues tant ce discours me semble dépassé, une fois que je l'entends "en vrai".

J'ai beau mentionner les handicaps invisibles, ré-expliquer ma situation, montrer la carte… Rien à faire.

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Elle me dit que rien ne lui dit que c'est ma carte, je montre mon visage littéralement imprimé dessus, elle hausse les épaules et me redit que j'ai l'air en pleine forme et qu'elle voit pas pourquoi elle me devrait me laisser passer.

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A ce moment, sort une femme un peu plus jeune, avec une canne. Je me sens presque soulagée, je me dis qu'elle doit subir le validisme aussi, qu'elle va pouvoir appuyer ma demande.

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Pas. Du. Tout. Cette femme se range complètement du côté de la première, désigne le bout de la file, me dit que ma carte "means nothing to her" (que ça vaut rien à ses yeux, argument qui sera repris par les autres femmes ensuite), que je dois faire la queue comme tout le monde.

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J'explique que littéralement le principe de la carte c'est de pas avoir à faire la queue, elle me répond que c'est pas une carte qui donne un "priority access", j'explique que… Si, littéralement (la carte s'appelle carte de priorité quand même 🙃).

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Elle me dit qu'elle peut pas savoir vu que c'est pas une carte internationale en anglais. (c'est vrai qu'il y a vraiment aucune ressemblance entre priority et priorité 🤡)

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Bon, comme j'ai de plus en plus mal et de moins en moins d'énergie, je décide de m'adresser à la deuxième personne de la queue. Qui m'ignore. Tout simplement. Pas un mot, pas un regard, rien.

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Je vais donc à la troisième personne, qui me dit qu'elle, elle veut bien me laisser, à condition que toutes les personnes derrière acceptent aussi.

J'explique au mieux ma situation à la cantonnade aux autres femmes derrière
(avec la douleur qui monte en arrière plan, bien sûr)

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Refus de tout le monde, en bloc. C'est forcément assez humiliant, je me retrouve presque à supplier.

Plusieurs femmes me pointent alors les WC des hommes, comme quoi il y aurait des WC fermés que je pourrais utiliser.

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Totalement décontenancée, avec un niveau de douleur à peine tenable, je me retrouve à attendre devant une pissotiere avant de découvrir que la porte indiquée est une porte de service, et en aucun cas des WC.

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A ce moment là, je suis à bout. On est sur un site immense, je sais pas si et où il y aurait d'autres toilettes. Je suis totalement désemparée, je me sens humiliée. J'ai très mal. Je fonds en larmes.

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J'ai fini par trouver d'autres toilettes, à plusieurs minutes de marche. Autant vous dire que c'était un peu tard, la crise était installée et a duré plusieurs jours.

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Au delà du validisme et du manque d'empathie de ces femmes, qui ont choisi de m'humilier, de nier mes souffrances plutôt que de perdre deux minutes de leur journée pour me laisser passer, j'ai détesté constater mon manque de répondant dans cette situation.

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De pas avoir réussi à faire valoir mon droit. Pourtant, les contre-arguments, je les avais. Les réponses chocs que j'aurais pu rétorquer, elles sont arrivées en avalanche une fois l'événement terminé.

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Mais sur le moment, j'avais mal, j'avais pas l'énergie de me battre plus que je ne l'ai fait. J'aurais voulu que ce soit simple. J'avais *besoin* que ce soit simple.

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J'espère vraiment que la prochaine fois que ça se produira, j'arriverai à m'imposer, ne serait-ce que parce que maintenant j'ai des phrases toutes prêtes dans ma tête.

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Mais le bilan, c'est surtout que je pense que je serais encore plus anxieuse et réticente à l'idée d'utiliser ma carte à l'avenir.

Alors que je sais bien qu'il faudrait justement s'affirmer pour lutter contre leurs représentations moisies du handicap.

Bref, ça craint.

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