Des soins palliatifs plutôt que l’euthanasie
Où on va suivre le parcours de D, une combattante du cancer.
Le cancer frappe n’importe qui, n’importe quand, et est assez injuste pour toucher y compris des enfants. Aujourd’hui, on va parler d’une malade du cancer du pancréas. D. a eu la possibilité de passer par les soins palliatifs, qui offrent une meilleure prise en charge des personnes en fin de vie. À l’heure où le sujet de l’euthanasie est au programme de nos parlementaires, repensons à l’Humain.
C’est @Dr_Zoe_ qui témoigne, en tant que proche.
Des soins palliatifs plutôt que l’euthanasie
Je vais vous parler de l'histoire d'une femme atteinte d'un grave cancer.
Loin des discours théoriques, cette histoire raconte le validisme, la violence médicale, l'état du soin en France.
Et surtout pourquoi demander l'euthanasie n'est pas un choix dans le système actuel.👇
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Quand D. a su qu'elle était atteinte d'un cancer du pancréas inopérable, elle était ravie d'être suivie par un grand Professeur de médecine.
Elle espérait entrer dans des essais cliniques et bénéficier d'un éventuel nouveau traitement qui lui permettrait de survivre.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Le cancer fatigue. Il fait mal. Il est terrifiant.
Le plan de soin est à la hauteur de la violence de la maladie. Les rdv s'enchaînent, les chimios qui font vomir, les scanner qui angoissent, les consultations qui ne durent jamais assez longtemps car le médecin n'a pas le temps.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Rapidement après le début de la chimio, D. développe une mucite : des douleurs intenses de la muqueuse buccale qui l'empêchent de bien s'alimenter. Pour l'équipe soignante, c'est secondaire. Pour elle, ça prend toute la place dans sa vie. Et ce qu'on lui prescrit ne calme pas.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
La mucite durera plusieurs mois. Des mois à avoir mal, mais surtout des mois à avoir peur et à avoir la sensation qu'on ne l'écoute pas assez, qu'on ne prend pas assez le temps.
Puis un soignant qui pour une fois écoute et propose autre chose.
Et ça marche.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Pendant de nombreux mois, D. enchaîne les chimio et les scanners sont bons. La tumeur régresse. Elle est toujours là, mais elle régresse.
Puis elle grossit de nouveau. Très vite. Très fort. On lui dit que "à un moment, ça échappe !" et elle déteste cette manière de le dire.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
L'état de D. se dégrade rapidement. Elle est épuisée, reste allongée une grande partie de la journée, elle a mal, elle n'arrive plus à manger. Et son ventre gonfle énormément à cause de l'ascite : du liquide qui s'accumule à cause de métastases au péritoine.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
D. est hospitalisée dans un service d'oncologie.
Elle est dans une chambre double, sa voisine, aussi atteinte d'un grave cancer, est mal soulagée pour la douleur, elle gémit beaucoup.
D. a de la peine pour elle et ne peut pas dormir à cause des cris.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Les équipes courent partout. Personne n'a vraiment le temps. On lui parle de chimio "de confort" sans qu'elle comprenne vraiment ce que cela signifie, puis on lui dit que finalement elle est trop faible.
Chaque jour elle espère avoir enfin une place en chambre individuelle.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Depuis 10j, personne n'a eu le temps de lui faire un shampooing.
Alors ce sont ses proches, comme ils peuvent, en essayant de ne pas faire mal et de ne pas tirer sur les tuyaux des perfusions, qui s'en chargent.
D. n'en peut plus. Mais ça va un peu mieux avec les cheveux propres.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Des amis de D. qu'elle n'avait pas vu depuis un moment se mettent à trouver qu'elle est trop malade. Son corps est déformé, elle a mal, et c'est eux qui lui suggèrent de prendre contact avec une association qui propose des euthanasies illégales.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Les amis de D. ne lui ont pas demandé son avis avant de faire cette suggestion.
Qui veut-on soulager à ce moment-là ? D.? Ou les personnes valides pour qui voir le corps malade et déformé est insupportable ?
Ils sont tellement motivés qu'il lui fournissent le contact de l'asso.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
D. ne sait pas trop. Elle a peur de partir dans la souffrance. Elle aimerait surtout que ça aille le mieux possible, pas le plus vite possible.
Pour la 1ère fois, on l'informe de ses droits, des options possibles, et elle demande à être transférée en unité de soins palliatifs.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Par chance, une place se libère. Les places sont chères, en soins palliatifs.
Et là, c'est le jour et la nuit.A son arrivée, l'équipe soignante prend beaucoup de temps avec elle. Elle est examinée avec soin, elle peut poser toutes ses questions, et on lui répond.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Elle observe les relations au sein de l'équipe. Tout est beaucoup plus horizontal.
Le médecin parle respectueusement aux autres soignants, chacun a son rôle.
L'agence de service hospitalier discute, rassure, est missionnée pour aller acheter des glaces pour les patients.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
La chambre est lumineuse, il n'y a pas de voisin, les proches peuvent venir à n'importe quelle heure, ils peuvent rester dormir la nuit auprès d'elle.
On prend en charge sa douleur, ses nausées, ses angoisses.
D. est, pour la 1ère fois depuis le début de sa maladie, bien soignée.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Le vrai soin. Celui qui prend en charge la personne dans toute son entièreté et sa complexité. Celui qui écoute et qui s'adapte. Celui qui prend en compte les proches et l'environnement.
Celui qui demande de vrais moyens humains et matériels.
Celui qui coûte un pognon de dingue.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
D. est passionnée de musique.
Il y a un piano dans le service, elle joue un peu, ce que ses forces lui permettent.
Et le service s'ouvre à ses amis musiciens qui viennent jouer un concert pour elle, et pour tout le monde, patients, proches et soignants.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Quelques jours plus tard, la situation se dégrade encore.
D. a beaucoup d'eau dans les poumons, elle ne veut pas se sentir étouffer. L'équipe lui explique toutes les possibilités, elle choisit la sédation profonde jusqu'au décès, et meurt quelques heures plus tard.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
D. est partie sans douleur, entourée de ceux qu'elle aime et d'une équipe géniale.
D. a pu bénéficier de ce dont n'importe quel être humain devrait pouvoir bénéficier.Il est intolérable qu'on soit incapable d'aller chercher l'argent là où il est pour le mettre là où il faut.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
D'habitude, je vous parle de mon point de vue de soignante.
Cette fois je parle en tant que proche, car D. est une personne de ma famille, que j'aimais de tout mon cœur.
J'écris ce thread dans le train, en route pour ses obsèques.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Il n'y a pas de libre choix de mourir "dans la dignité" quand la seule alternative qu'on a ce sont des équipes mal formées et en sous nombre, des hôpitaux à l'agonie, et le regard dégoûté d'une société ne supportant pas la maladie et le handicap.
— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Dans le contexte de déliquescence du système de soin et d'une société capitaliste et validiste rendant impossible la vie des personnes handi et malades chroniques, la loi fin de vie acte un choix de rentabilité plutôt que d'humanité.
Nous voyons très bien ce qui va mal se passer.— Docteur Zoé (@Dr_Zoe_) July 7, 2025
Un autre article ?
On continue sur la thématique de la maladie, mais cette fois avec des bonnes nouvelles :

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