Thread : Non, la forêt d’Amazonie n’est pas le poumon de la planète !
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Un thread signé @fmbreon.
Certes la forêt d’Amazonie brûle mais utilisons les bons termes :
A l’occasion des incendies en Amazonie, on a beaucoup entendu que ce serait le « poumon » de la Terre. D’autres ont dit que, au contraire, l’océan est la source principale d’oxygène pour l’atmosphère. Qu’en est-il vraiment ?
THREAD— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Pour générer l’oxygène que on respire (le dioxygène, 02), il faut de la photosynthèse et un apport d’énergie (lumière solaire). Cette photosynthèse se produit sur terre (la végét.) ou dans les océans (plancton). Au premier ordre, le processus stocke du carbone et libère de l’O2.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
A l’inverse, la respiration (par les êtres vivants au sens large, donc incluant les plantes) utilise de l’O2 pour générer du dioxyde de Carbone, CO2. Une forêt mature, comme l’Amazonie, consomme quasiment autant d’O2 qu’elle n’en produit par la photosynthèse.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Puisque on respire, on consomme de l’O2 et il est donc nécessaire d’avoir un processus qui génère ou a généré ce dioxygène consommé. D’où vient t-il majoritairement ?
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Tout d’abord, pas de panique. Il y a PLEIN de dioxygène dans l’atmosphère et, même si toute photosynthèse s’arrêtait, on ne risquerait pas l’asphyxie avant plusieurs milliers d’années. Le problème pour nous serait l’accès à la nourriture **bien** avant.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Sur les **très** longues échelles de temps, c’est bien la photosynthèse dans l’océan qui a permis à l’atmosphère de devenir oxygénée. On peut donc dire que le dioxygène que nous respirons aujourd’hui a été générée dans les océans, par le phytoplancton.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Mais ça, c’était avant que l’humain vienne mettre un peu de bordel dans le système. Qu’en est-il aujourd’hui ? La figure montre, sur 20 ans, l’évolution du O2 atmosphérique a deux stations, et le CO2 sur 50 ans (pour les détails, c’est la figure 6.3 du rapport du GIEC AR5-WG1) pic.twitter.com/dbneKAcdEI
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Le dioxygène a donc diminué de 80 ppm en 20 ans. Pour rappel, la concentration est d’environ 200 000 ppm. On n’est donc pas près d’arriver à zéro. Sur la même période, le CO2 a augmenté d’un peu moins de 40 ppm.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
C’est là essentiellement la signature de la combustion de carbone fossile (Charbon, pétrole, gaz) par les humains, et dans une moindre mesure la déforestation. C+02=>CO2. Donc O2 diminue et CO2 augmente. Mais pourquoi pas dans les mêmes proportions (80 contre 40 ppm) ?
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
La première raison est que on ne brule pas du Carbone pur. Ainsi, lorsque on brule du gaz méthane, la réaction est plutôt CH4 + 3 O2 =>CO2 + 3H2O. Donc le O2 diminue 3 fois plus vite que le CO2 augmente.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Correction : CH4 + 2 O2 => CO2 + 2 H2O
Donc le O2 diminue 2 fois plus vite que le CO2 augmente— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
La seconde est que la végétation croît sur Terre, essentiellement stimulée par la hausse du CO2 atmosphérique, et ce malgré la déforestation et les incendies. Ce faisant, elle absorbe du CO2 et libère de l’O2. Sur les dernières décennies, la végétation est une source d’O2.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
L’océan absorbe aussi du CO2, pratiquement autant que la végétation. Mais, l’essentiel de ce CO2 est dissous dans l’eau et n’est pas absorbé par le processus de photosynthèse. Il y a donc peu d’émission de O2 en regard du CO2 absorbé par l’océan.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Sur les dernières décennies, les émissions de O2 de la végétation sont donc bien supérieures à celles de l’océan. La photosynthèse stimulée par la hausse du CO2 atmosphérique permet de stocker du carbone et libére une partie de l’O2 consommé par la combustion du carbone fossile
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Ce qui est dit ci-dessus est valable pour les échelles annuelles. La figure du GIEC donnée ci-dessus montre bien qu’il y a un cycle saisonnier du O2 atmosphérique très important, beaucoup plus que celui du CO2.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Les causes de ce cycle sont d’une part celui de la photosynthèse (principalement en printemps/été, aussi bien sur terre que dans les océans) et (ii) l’absorption/dégazage des océans (une eau qui chauffe rejette une partie des gaz dissous, donc émission d’O2 en été).
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Ainsi, en été, l’océan est une source importante de O2 vers l’atmosphère. Mais, en hiver, il absorbe de l’O2. Le bilan annuel est pratiquement équilibré. La végétation est une source d’O2 plus importante que l’océan, mais inférieure aux pertes dues à la combustion des fossiles.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Conclusions (i) l’Amazonie n’est PAS le poumon de la planète ; (ii) l’océan a fourni l’oxygène de l’atmosphère très lentement pendant très longtemps ; (iii) la combustion des fossiles diminue très faiblement l’O2 atmosphérique qui est partiellement renouvelé essentiellement…
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
…par la croissance de la végétation ; (iv) il y a plein de O2 dans l’atmosphère et on ne risque pas d’en manquer ; (v) les incendies en Amazonie sont un désastre écologiques mais ne mettent pas en péril notre source d’oxygène.
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019
Merci à @laurent_bopp qui m'a donné un coup de main pour la compréhension des mécanismes principaux
— Francois-Marie Bréon (@fmbreon) August 29, 2019